Face à l’éolien, le patrimoine fait front

Valérie et Pieter Van Staalduinen dans le parc de leur château, avec une vue imprnable...
Valérie et Pieter Van Staalduinen dans le parc de leur château, avec une vue imprnable...

Environnement – CHINON

De Lerné à Bournand, les habitants se mobilisent contree les projets éoliens. Et la préservation de leur patrioine est leur nouvel agument.

La commune de Lerné offre une vue dégagée sur la plaine qui s’étend jusqu’à Loudun (Vienne) et son donjon. Pourtant, les ombres des éoliennes planent. Car les projets sont nombreux : Mouterre-Silly, Martaizé, Ceaux-en-Loudun.  Mais aussi Bournand. Un véritable corridor de moulins à vent modernes qui provoque l’ire, jusqu’en Indre-et-Loire. Pieter et Valérie Van Staalduinen sont aux premières loges. Propriétaires du château des Coudreaux depuis sept ans, ils l’ont patiemment rénové. Cette demeure du XVIIIe siècle, ainsi que ses dépendances, sont désormais labellisées gîte de France. Trente-quatre couchages accueillent les vacanciers en mal de campagne, avec des jardins offrant une vue imprenable sur le Loudunois. « C’est ce qu’on vend à ceux qui viennent chez nous, montre la propriétaire. Nos clients viennent pour la nature, le calme… » Mais voilà : un projet de quatre à huit éoliennes pourrait voir le jour, à quelques kilomètres de chez eux, à Bournand, poussé par son promoteur, Voltalia. Et le couple n’en veut pas.

Appuyé par David Manson, président de l’Association pour la sauvegarde de l’environnement et du patrimoine rural de Bournand-Vézières et alentours, le discours est rodé. Les éoliennes ne seraient finalement pas si écologiques, faites de matières peu recyclables, avec une durée de vie limitée, et avec des conséquences sur les oiseaux. L’intermittence de leur production nécessite des sources d’énergie annexes, et quand elles tournent, le bruit généré serait une vraie nuisance. Surtout, cela pèserait sur le tourisme. David Manson sort une étude, publiée suite à un projet dans l’Indre : 72 % des touristes changeraient de destination si des éoliennes étaient visibles depuis leur lieu de vacances.

TOUT GÂCHER ?

« On a été subventionnés pour le gîte, près de 10 % du montant total. On a un cahier des charges qui nous pousse à l’excellence. Et là, on subventionne des éoliennes qui viennent tout gâcher ? », s’insurge Pieter Van Staalduinen, par ailleurs élu municipal à Lerné. À Bournand, l’adjoint au maire, Thierry d’Hueppe et son épouse, Marie, qui tiennent le gîte du château de Bournand, à tout juste un kilomètre du projet, sont également vent debout. La nouvelle municipalité a été élue, notamment, sur son opposition aux générateurs. « C’est tout Bournand qui sera touché », estime-t-il. Marie d’Hueppe redoute la venue de ces moulins à vent de plus de 180 mètres de haut. « Il y a actuellement une vraie demande de retour à la campagne. Mais s’il y a des éoliennes, tout notre argumentaire de l’absence de nuisance tombe à l’eau. »
Alors, avec son époux, elle a entrepris une démarche de classement de son parc au titre des Jardins remarquables. « Ce sera une pierre de plus contre le projet. »

L’argument du patrimoine est aussi brandi par le maire de Lerné, dont la commune n’a pour l’instant pas pris de position officielle. Inclue dans la zone tampon du Val de Loire, classé à l’Unesco, la commune s’associe avec La Roche-Clermault, Marçay et Seuilly pour être classées comme le théâtre des guerres Picrocholines. Un argument qui pourrait également peser contre le projet. Et une comparaison revient dans la bouche de Pieter Van Staalduinen : « Les tours de la centrale d’Avoine ne dépassent pas 28 mètres. C’était fait exprès pour protéger le patrimoine d’Indre-et-Loire. Pourquoi ce n’est pas possible ici ? »

AUCUN PROJET DEPOSE EN PREFECTURE

Le projet éolien n’a pas été déposé à la préfecture de la Vienne, assurent les services de l’État. S’il venait à l’être, une phase d’examen par le bureau environnement de la préfecture s’ouvre, avant d’être confié à la Dreal. Si l’avis est positif, l’enquête publique commence pour un mois. Le public, les communes concernées et limitrophes donnent alors leur avis. C’est ensuite à la préfète de trancher. Des recours auprès de la Cour administrative d’appel peuvent alors être intentés.